Le sureau 2/3 : Histoire, mythes et traditions

Sureau (Joanna Boisse)

Les premières traces du sureau se retrouvent dès la préhistoire. En effet, des fouilles archéologiques ont mis à jour des amas de graines qui prouveraient que les hommes utilisent déjà les baies de sureau probablement pour un usage culinaire. Plus tard, les grecs ont largement recours à son usage médicinal. Hippocrate vante ses vertus diurétiques et laxatives. Galien recommande le sureau contre les cathares et les excès de mucus. Le savoir grec a également voyagé à travers l’Asie et le sureau est intégré à la pharmacopée ayurvédique.

Pline l’ancien, dans son histoire naturelle,  en décrit son utilisation je cite: «la décoction de la feuille, de la baie ou de la racine, dans du vin vieux prise à la dose de 2 cyathes, évacue l’eau du ventre. Elle calme aussi l’inflammation, surtout celle de brûlures récentes, et l’application des feuilles les plus tendres avec de la polente calme les morsures de chien. [….] Les feuilles prises dans du vin pour combattre les blessures faites par les serpents. Les jeunes pousses en application avec du suif de bouc sont excellentes pour la goutte.».

Selon Platéarinus, «le jus de l’écorce seul ou avec du miel, tue les vers du ventre.

Au Moyen Age, on utilise l’eau de sureau, une macération d’eau et de fleurs, pour éclaircir le teint et atténuer les taches de rousseurs. Les fleurs et les fruits ont longtemps servi à la fabrication de boissons. Au printemps, on boitt de grandes quantités de sureau afin de purifier l’organisme des toxines accumulées durant l’hiver.

Sur les autres continents, les propriétés du sureau sont fortement connues. Les Amérindien par exemple utilisent des compresses de sureau blanc (Sambucus cannadensis), cousin de notre sureau aux propriétés analogues, pour lutter contre les maux de tête, d’oreilles, les inflammations des yeux. Les bois et les bourgeons sont bouillis et servent à lutter contre les inflammations et le paludisme.

Ces remèdes semblent universellement connus; la phytothérapie allemande utilise encore aujourd’hui les compresses de sureau pour lutter contre le mal de tête.

Dans la mythologie, le sureau tient une place particulière:

Chez les celtes, le sureau est associé aux cultes des morts. Les druides confectionnent des flûtes magiques en bois de sureau qui permettent de communiquer avec l’ esprit des défunts. Beaucoup de divinités maternelles et protectrices y vivent.

Au début de la chrétienté, jusque là nommé arbre aux fées, son statut change. La double personnalité du sureau est encore accentuée. Il devient celui qui abrite les esprits sataniques, le respect se transforme en crainte. Judas après avoir trahi le Christ se pend à un sureau. Depuis on lui donne le nom d’arbre à Judas et se baies seraient devenues immangeables. La croix du Christ aurait été faite en sureau.

Du moyen âge à nos jours, selon les régions, l’aspect positif ou négatif du sureau prédomine. Néanmoins, une constante persiste: l’arbre est craint et respecté. On pensait que les reines des Fées et des Sorcières vivaient dans le sureau et le protégeaient, c’est pourquoi, le couper provoquait la malchance voir la mort. On ne faisait pas les barrières de bétail en sureau, car on aurait enfermé les divinités avec les bêtes. Devenu symbole du diable, il ne pouvait être mis au feu.

Chez les peuples gitans, chaque année, par une belle nuit du mois de mai, les mères font une pâte à beignets puis font chauffer une friteuse d’huile sur le feu du camp. Elles se déplacent à plusieurs sous les sureaux en fleur, sur l’arbre et en font des beignets. Le matin au réveil, les enfants du camp découvrent les arbres couvert de beignets dorés encore sur les arbres. Il ne leur reste plus qu’à déguster le cadeau des dieux. Contre la fièvre, une tige de sureau doit être plantée dans le sol silencieusement.

Branche de sureau

Branche de sureau (AnRo0002)

En sorcellerie, on appelle le sureau la «Vieille femme». Il est apparenté à Vénus, et représente l’élément eau. Les Déités qui lui sont associées sont Vénus et Holda, la Déesse Mère. On l’utilisait fréquemment pour faire des baguettes magiques en enlevant la moelle, qui était remplacée par une tige de cuivre. Pour plus d’efficacité, la tige devait être coupée à minuit le soir du solstice d’été.

Les flûtes pour communiquer avec les esprits étaient faites en sureau. La flûte du dieu Pan, dieu de la forêt et des animaux, elle-même, aurait été en sureau. Mère sureau était la femme du Dieu Pan. Si un herboriste s’approchait avec respect du sureau et demandait poliment à Mère Sureau la permission de se servir, elle partageait volontiers ses secrets.

Si on se baigne les yeux avec du jus vert de bois de sureau, on peut voir les fées et les sorcières. Le sureau est l’arbre de la treizième lune qui symbolise le pont entre la fin et le commencement. Il est associé à la rune Raido, celle du cheminement et du voyage chamanique.

Dans la Traditions, le sureau est planté près des maisons pour  les protéger de la foudre. Porté sur soi, il protège de toutes les agressions y compris les sortilèges. Un mai de sureau planté devant la maison d’une jeune fille indique qu’elle n’est pas vaillante et qu’elle fera une mauvaise épouse. Lors des mariages, on offre aux époux du sureau qui leur porte bonheur.

Pour lutter contre l’arthrite, on noue sur une jeune branche souple de sureau autant de nœuds que le patient a d’articulations douloureuses.  On fait de l’ensemble une couronne que l’on suspend au dessus du lit.

Les bâtons des voyageurs de Saint Jacques de Compostelle sont en sureau. Des canes plus solides , peuvent servir d’armes et sont faites avec du plomb coulé dans une branche évidée de sa moelle.

Dans les Landes, au soir de la Saint Jean, on fabrique des Caremera qui sont brûlées dans le feu à la fin de la soirée. Une branche de sureau placée sous l’oreiller permet de dormir paisiblement.